Le Casque d'Armancourt

Le hasard, cette providence des policiers, mais aussi des archéologues, nous ayant mis récemment sur la trace d'une découverte archéologique, faite peu d'années avant la guerre de 1914, nous fûmes assez heureux pour acquérir cette trouvaille et en obtenir quelques renseignements de la personne qui l'avait alors recueillie.

Le casque d_Armancourt 2.png

La belle pièce que voici (fig.1), aurait été découverte au cours des dragages de l'Oise, près de l'île du Grand Peuple, rivage Nors, terroir d'Armancourt (Oise). C'est un casque formé de deux feuilles de bronze très mince, estampées sur un calibre et réunies par un rabattu  vers le sommet de la calotte, en forme de crête aplatie et saillante de 20 mm environ.
La partie inférieure du casque est reliée par six rivets ou longues goupilles cylindro-coniques en bronze, rivées en dedans (trois en avant et trois en arrière).
Les rivets (côté droit de la fig.1) ont de haut en bas: 27mm - 25 mm - 24 mm de longueur. Les autres ont 24 mm;  le troisième rivet n'existe plus; le trou destiné à son passage  mesure 4,5 mm de diamètre.
Trois filets en relief et parallèles ornent le bandeau qui a 47 mm de hauteur et la partie inférieure est repliée intérieurement, formant ainsi un léger bourrelet sur lequel devait venir s'appuyer une calotte de cuir ou d'étoffe destinée à amortir le contact du métal sur la tête du soldat et à rendre ainsi plus agréable le port du casque.
Les côtés de la calotte présentent au centre un léger renflement en arête, disparaissant au sommet et à 75 mm du bord inférieur. On y remarque également trois séries de deux trous de 2 mm de diamètre; les premiers distants de 5 mm sont situés à 70 mm du bord inférieur; les seconds, distants de 7 mm le sont à 35 mm du bord et les troisièmes distants de 30 mm sont situés à 10 mm de la bordure.
Les deux premières séries de trous que l'on remarque de chaque côté de la calotte ont probablement servi de passage à des rivets destinés à fixer sur les côtés des oreilles de bronze, ainsi que cela existe sur des casques de Bernières d'Ailly (Pl. I).
Les trous du bandeau devaient servir à fixer le matelas protecteur à l'intérieur du casque et peut-être aussi une jugulaire en cuir.
La hauteur du casque est de 26 cm et son poids est actuellement de 520 grammes; le diamètre transverse est de 16 cm et celui antéro-postérieur de 22cm environ.
Le soldat qui le portait était donc dolichocéphale (qui a le crâne allongé).
En archéologie, il ne faut jamaiscertifier la provenance d'un objet dont on n'est pas certain; c'est pour cela que nous avons dit que ce casqueaurait été trouvé à Armancourt, lors des dragages de l'Oise.
Mais en examinant attentivement cette belle pièce, on peut affirmer qu'elle a été recueillie dans une rivière, car elle en porte les traces indubitables; un des côtés est recouvert en partie de la gangue calcaire si typiquedes objets ayant séjourné longtemps au contact des eaux courantes, et l'intérieur du casque, fortement patiné, présente encore des adhérences de grève calcaire.
Les renseignements qui nous ont été donnés sur cette découverte sont donc vraisemblables et pour distinguer ce casque de ceux cités dans l'étude comparative, nous l'appellerons désormais "le casque d'Armancourt".

D'après une étude comparative avec les plus anciens casques connus, dont nous passerons içi les détails, nous voyons que le casque d'Armancourt est de même forme que ceux du premier groupe, 1ère catégorie, et qu'il ressemble beaucoup, quoique de profil plus élégant, aux casques de Bernières d'Ailly (Calvados).
Il est donc comme eux, de la fin de l'age du Bronze (Bronze IV), c'est à dire de 1000 à 900 ans avant notre ère.

Le casque d_Armancourt 4.png

Comment ce casque est-il venu s'échouer à Armancourt, dans les graviers de la rivière ?
Il est impossible de le savoir. Mais si l'on jette un oeil sur la carte archéologique de l'Oise pour l'age du Bronze, on remarque que presque toutes les découvertes d'armes ou d'objets de cette époque lointaine, ont été faites dans le voisinage des cours d'eau, principalement des grandes voies de communication qu'étaient alors l'Oise et l'Aisne.
C'est par les vallées de ces rivières que se faisaient alors les échanges commerciaux, mais c'est aussi par ces chemins naturels que s'effectuèrent les invasions des peuplades guerrières dont l'origine est encore inconnue.

Ah ! si nous pouvions connaître le passé du casque d'Armancourt, que de choses importantes, jusqu'alors ignorées, pourrions nous apprendre.


Extrait des notes de Marcel Hemery 1926